Le projet de réhabilitation

Notre ferme est un exemple typique des fermes bressanes du XIXe, construites selon la technique du pisé.

Voir article Le pisé dans la rubrique "Les matériaux"

Le projet de réhabilitation de notre ferme est étroitement lié à notre projet de vie: nous souhaitons, de manière aussi cohérente que possible, appliquer les mêmes "principes permaculturels" pour le logement que pour son environnement extérieur.

Pour l'efficacité énergétique du bâti, on parle de bioclimatisme.

Concrètement, le bioclimatisme correspond à la recherche de l'adaptation optimale du logement à son environnement, pour un maximum de confort, et un minimum d'impact écologique et de dépendance énergétique.

Selon la région et la saison, l'accent sera mis sur la conservation de la fraîcheur estivale, ou au contraire l'apport solaire par des surfaces vitrées Sud, l'inertie ou au contraire la capacité des matériaux à chauffer rapidement, etc...

Cela implique, dans notre choix de rénovation, de privilégier des matériaux:

- locaux, abondants et économiques: bois, paille, terre...

- à faible impact environnemental: ressources locales ne nécessitant pas ou peu de transport, faible énergie grise, bon bilan carbone et possibilité de recyclage en fin de vie

- compatibles avec le bâti ancien (donc respirants)

- que l'on peut mettre en oeuvre nous-même, ou aidés de professionnels

Principe du bioclimatisme (source: terre-crue.fr et alec-rennes.org)

Dans le même esprit, nous réutiliserons également au maximum les éléments déjà présents sur la ferme ou que nous récupérerons en cours de travaux (tuiles, pierres, piquets, bois de coupe ou de charpente, terre à pisé, tôles, terre argileuse, parefeuilles, etc...).

Tous ces matériaux peuvent s'avérer fort utiles dès lors que l'on doit (par exemple): poser un drain ou un hérisson, construire un poulailler, reprendre une charpente ou une couverture, construire un muret ou une bordure, aménager une allée, faire des enduits divers....

Pas question donc de les jeter!

Seuls partiront à la déchetterie les grâvats de ciment, plâtre, mousse expansée, laine de verre, polystyrène...

Ceci rejoint un point important du bioclimatisme cité plus haut: la prise en compte de l'impact écologique ET du recyclage possible des matériaux en fin de vie. Et sur ce point, béton et isolants "traditionnels" sont catastrophiques.

Concernant l'aménagement intérieur, il nous faut revoir l'agencement des pièces, puisque l'habitation était jusqu'alors une résidence secondaire sommairement conçue, avec:

- une pièce principale regroupant cuisine, sdb et WC.

- un salon "dans son jus" humide et non isolé.

- deux chambres séparées par un grand couloir sans utilité.

Toutes les cloisons seront de toute façon cassées pour que nous puissons refaire des dalles de chaux.

Plan d'origine: seul le couloir entre les deux chambres n'apparaît pas.

A terme, nous aurons en bas 3 espaces:

- la cuisine, avec un WC

- un bureau/chambre d'amis avec salle de bain

- une salle à manger ouverte sur un salon

En haut nous aurons également 3 espaces:

- une première grande chambre parentale

- une seconde grande chambre séparable en deux espaces pour nos filles

- une salle de bain avec WC

Plans d'aménagement RDC et étage

Pour la cohérence bioclimatique adaptée à notre région (Ain), nous avons réfléchi aux points suivants:

- l'entrée se fera par une pièce technique (chaufferie), qui fera ainsi office d'espace tampon afin de limiter les entrées d'air froid en hiver.

- cette pièce technique, mitoyenne à la cuisine, regroupera: un espace chauffage (chaudière, ballon tampon, petit stock de bois), un espace électricité (tableau, disjoncteur), un espace buanderie (lave-linge, évier) un espace stockage (étagère, congélateur), l'accès aux évacuations principales et un emplacement gaz butane relié à la cuisine.

- les menuiseries auront une surface vitrée maximale pour un gain solaire optimum. Cela permettra en partie de compenser l'absence d'ouvertures au Sud à cause de la mitoyenneté avec la grange.

- Dans les pièces avec plusieurs fenêtres, certaines auront un châssis fixe: moins cher à l'achat, plus de surface vitrée, et moins de "faiblesses" d'isolation en raison de l'absence de système d'ouverture.

- à l'inverse, les deux vélux à l'étage (couloir et salle de bain) seront de petite dimension pour limiter la surchauffe estivale de ces deux petites pièces.

- le rdc (sans la chaufferie) et l'étage représentent un volume cubique, plus aisé à chauffer. L'escalier sera central avec un poêle à bois en bas (pour l'inter-saison), pour que la répartition naturelle de la chaleur soit facilitée.

- notre chaudière alimentera des murs chauffants dans chaque pièce via un circuit hydraulique en basse température (consommation réduite par rapport à un circuit standard en haute température). Nous profiterons ainsi de la formidable inertie de nos murs en terre et d'un chauffage rayonnant "des pieds à la tête".

- toutes les parties desservies en arrivées d'eau et évacuations se trouveront de part et d'autre d'un même mur. La mise en place des canalisations sera donc réduite et d'une très bonne accessibilité via la pièce technique en cas de problème. Seule l'évacuation principale vers l'extérieur sera noyée dans la dalle de cette pièce.

- une colonne technique passera derrière nos 2 WC (suspendus et situés exactement l'un au dessus de l'autre), et montera jusqu'au toit. Y passeront les arrivées d'eau, les canalisations et leurs aérations, la VMC, et le système de tubes chauffants. Cette colonne sera facile à isoler et limitera ainsi les ponts thermiques générés par tout un ensemble d'éléments traversants les murs ça et là.

- nos murs donnant sur l'extérieur seront isolés par 15cm de TPC banché (très dosé en paille) puis terminés par un enduit terre qui servira de support inertiel aux murs chauffants. Nous avons fait le choix d'isoler notre pisé puisque la partie habitable se trouve côté Nord de la ferme. La continuité de l'isolation sera assurée sur les murs de refend, toujours au TPC mais en couche moindre (5cm), et sur les sols au RDC (liège) et à l'étage (chappe légère chaux-chanvre). Les ponts thermiques seront ainsi nettement diminués.

Cette approche de la conception du bâtiment s'avère passionnante mais nécessite réflexion, patience, lectures et recherches.

Elle implique d'accepter la remise en question de plusieurs aspects du projet en fonction des contraintes locales (climat, emplacement du bâtiment, approvisionnement en matériaux...)

Si l'approche bioclimatique et écologique de la conception/rénovation vous intéresse, je vous conseille la lecture des livres de J-P OLIVA, pionnier du bioclimatisme en France dans les années 80, ainsi que les nombreux sites, blogs et forums fréquentés par des d'auto-constructeurs, rénovateurs, et même professionnels du bâti ancien.